Le terme « discrimination » est dérivé d’une locution latine « discrimination» qui signifie séparation, action de distinguer. Il est ainsi utilisé dans le langage courant au sens d’opérer une distinction, une séparation, une différenciation. Discriminer signifie donc séparer, opérer une distinction qui apparaît le plus souvent connotée péjorativement. Discriminer, c’est hiérarchiser, traiter de manière moins favorable ceux
qui précisément sont victimes de discrimination au sens juridique du terme.
La réflexion juridique sur la discrimination porte sur des critères tels que, l’âge, l’identité sexuelle, l’appartenance syndicale, la religion, l’apparence
physique, le lieu de résidence, l’égalité entre homme et femme ou à l’exercice de libertés des salariés liées parfois à des choix dans leur vie privée. Dans ce contexte, comment qualifier tels discriminations fondées sur des éléments relevant de la vie privée des salariés ?
Lorsque des salariés font l’objet de différences de traitements, il s’agit de la femme musulmane, la femme syndiquée, l’homme à l’apparence physique féminine, la mère isolée, le père isolé. La preuve et le concept de discrimination font apparaître les enjeux et les limites de la sphère d’autonomie de la personne au travail. Une difficulté s’impose donc lorsque l’on cherche aujourd’hui à prouver des discriminations dans la carrière par panel de comparaison ou à prouver une discrimination indirecte. L’intention discriminatoire ne s’affiche pas et l’auteur de la discrimination non plus. Les notions de discrimination indirecte ou de discrimination directe dissimulée, répondant chacune à une logique propre, ne permettent toutefois pas toujours de révéler les différentes facettes des discriminations actuelles, tantôt individuelles, tantôt structurelles, tantôt les deux à la fois.
La construction du droit de la non-discrimination en droit du travail s’est organisée autour d’un article clef, l’article 9 du code du travail : « aucun salarié ne peut de son sexe de sa situation de famille, de son appartenance à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou de ses convictions religieuses. Toute disposition contraire est nulle de plein droit ».
Ainsi, « les personnes handicapées ne peuvent généralement recevoir un traitement identique aux autres salariés puisqu’ils sont dans une situation différente. Tenir compte « raisonnablement » de cette différence, identifier et éliminer des obstacles à l’égalité de traitement entre travailleurs est désormais une obligation pour l’employeur ».
La rémunération d’un salarié par exemple ne doit pas être fondée sur son sexe mais sur une évaluation objective du travail accompli. L’article 346 du code du travail consacre expressément ce principe en prohibant toute discrimination de rémunération entre hommes et femmes pour un travail de même valeur.
La recherche du motif déterminant peut paraître suffisante dans un certain nombre de cas ou lorsqu’elle permet de caractériser un motif à propos duquel il y a des hésitations.
Par ailleurs, il n’existe pas une interdiction du travail de nuit des femmes dans l’industrie (sauf les femmes enceintes) ce qui établit une inégalité de traitement en matière de conditions de travail entre les hommes et les femmes. Elle faut aboutir à écarter les femmes des emplois qui comportent un travail de nuit, spécialement des emplois où le travail est organisé par équipes successives. Elle provoque donc des problèmes tels que le harcèlement sexuel, ou moral, ainsi que des problèmes familiaux. Ainsi, l’égalité des droits entre la femme et l’homme, le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi, le principe de non-discrimination à raison des origines, des opinions ou des croyances, la liberté syndicale, le droit de grève, la participation du travailleur à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises, la protection de la
santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs, seraient don appréhendés à l’aune de la quête du bonheur.
Les deux notions, d’égalité et de lutte contre les discriminations, se rencontrent donc, bien qu’elles reposent sur des fondements différents. « La prohibition des discriminations traduit juridiquement une conception de
l’homme, appréhendé en lui-même et pour lui-même, tandis que la règle d’égalité traduit une pensée sociologique qui implique toujours une comparaison. Cette distinction n’est pas toujours aussi nette que cela, dans la mesure où les différences de situation professionnelle entre les hommes et les femmes constituent parfois une atteinte à l’égalité, parfois une discrimination, parfois les deux »
Brahim ATROUCH
Docteur en Droit
Professeur universitaire
Ex-inspecteur divisionnaire du travail et des relations sociales
Article du magazine « AIGLE », 4ème édition