Dans une période aussi périlleuse que celle actuelle, beaucoup de jeunes se sont lancés dans l’entrepreneuriat. On le comprend bien, le contexte actuel n’est généralement pas très favorable pour une insertion professionnelle dans des secteurs qui ont été largement impactés par la crise du Covid-19. Des salariés ont également vu leur place bouleversée par des changements stratégiques mis en place par leurs entreprises, ce qui a remis en question le processus de construction identitaire dans ces structures. Ils ont décidé eux aussi de se lancer dans l’entrepreneuriat.

Quelles sont les chances de réussir cette transition qui pourrait être si vitale dans la carrière de la personne ? Est-ce par difficulté ou par opportunité qu’elle s’est lancée dans cette aventure ? Est-ce pour trouver un poste, un rythme de travail plus en harmonie avec ses valeurs et sa vision de vie ? S’agit-il d’une décision bien mûrie ?quels sont les facteurs clés de succès sur lesquels l’entrepreneur se fonde pour réussir le lancement de son affaire ? Croit-il qu’il va réussir dans son projet ? Que compte-t-il faire pour pérenniser et rentabiliser son projet ?…

Autant de questions auxquelles le coaching entrepreneurial se propose d’apporter un éclairage, à travers un travail de questionnement et d’introspection qui va ouvrir la voie, pas à pas, vers une validation de l’identité d’entrepreneur. La personne sera ainsi plus prédisposée à habiter la fonction de chef d’entreprise, construire sereinement son projet et croire pleinement à sa réussite à travers un système qu’elle aurait validé avec son coach entrepreneurial sur le plan rationnel et émotionnel.

Ceci dit, au niveau pré-création, l’appui du coach est vital, puisque le cheval de bataille à ce niveau-là serait de vérifier la congruence entre l’identité de l’entrepreneur chez le porteur du projet, ses motivations profondes, son système de croyances et de valeurs et le projet lui-même. Mettre en exergue ses ressources, internes et externes, ses talents, ses aspirations, mais aussi ses limites, peurs et stratégies inconscientes d’auto-sabotage. En effet, les peurs fondamentales de la personne peuvent persister quelque soient les situations, et les ignorer pourrait remettre l’entrepreneur face à des blocages réels. Ceci permettrait de booster sa confiance en lui-même, accroître son autonomie et sa proactivité, et faciliter sa capacité à détecter et à résoudre ses problèmes à l’aide de ses propres ressources.

Au niveau post-création, l’utilité de l’intervention du coach entrepreneurial n’est pas de moindre importance, force est de constater que 80% des entreprises nouvellement créées disparaissent durant les cinq premières années, et que 80% de celles sui survivent font faillite au cours des cinq années suivantes. A ce niveau-là, l’accompagnement du coach entrepreneurial peut porter sur un ou plusieurs axes suivants :

La transition d’un porteur de projet à un vrai chef d’entreprise :

L’entrepreneur est une personne qui se caractérise d’abord et avant tout par un fort sentiment d’indépendance. Il veut faire ce qu’il aime, de la manière qu’il juge opportune. Cependant, et avec les meilleures intentions du monde, il ne fait pas forcément tout ce qu’il faut pour assurer la pérennité et la prospérité de son entreprise.

Pour bien comprendre l’entrepreneur, nous nous basons sur les travaux de Michael E.Gerber (1995). Pour lui, tout entrepreneur est habité par une AME (acronyme bâti avec : Artisan, Manager et Entrepreneur) dans laquelle se côtoient trois personnages :

• L’Artisan : c’est l’expert, généralement celui qui est à l’origine de l’idée. Celui qui a atteint un certain degré de maîtrise de son art, de son métier. Il aspire à faire les choses par lui-même. La difficulté de l’artisan c’est qu’il veut faire les choses selon ses propres procédés. Il est convaincu que la prospérité de l’entreprise réside dans des produits ou services de qualité supérieure, même au détriment des coûts et/ ou des délais.

• L’Entrepreneur : c’est le visionnaire de l’entreprise, celui qui voit des opportunités à saisir, où d’autres n’en voient rien. C’est généralement l’étincelle qui a donné le coup de pouce aux travaux de création. Sa particularité, c’est de vouloir profiter d’une niche insuffisamment exploitée, et de mettre en place les ressources nécessaires, sans pour autant qu’il en soit l’artisan.

• Le Manager : c’est celui qui cherche à résoudre les problèmes, voire à en prévenir la survenue. Il se veut pragmatique, orienté efficacité. Son maître-mot : instaurer des systèmes fiables. Or, la réalité d’une structure qui démarre dépasse largement des situations répétitives pouvant être gérées dans le cadre de systèmes mis en place.

Le rôle du coach entrepreneurial est de développer la conscience de son coaché pour que ces trois parties en lui coexistent, se développent et font bon ménage ensemble. Si une partie prend le dessus sur les autres, elle peut nuire au développement harmonieux de la structure.

L’accélération de la maturité de l’entreprise :

De l’émergence de l’idée de création d’entreprise, celle-ci passe par des phases formant un cycle de vie. Il est crucial de comprendre à quelle phase se situe l’entreprise afin d’adapter la stratégie de coaching :

• L’émergence : L’idée de l’Artisan émerge comme un projet à part entière. Il s’investit à faire ce qu’il aime et d’en faire son emploi, mais il peut s’investir de façon démesurée, car « c’est lui l’entreprise ». En réalité, il n’est pas encore un chef d’entreprise, il est plutôt l’employé principal. Les exigences de la production vont le consumer au fur et à mesure que le projet prend de l’ampleur. Le coach intervient à ce niveau pour l’aider à gérer cette transition et intégrer qu’un chef d’entreprise doit faire un deuil à ce niveau-là et accepter de créer des emplois et de leur transférer une partie de son savoir-faire. Profit des clients, il a une vision intégrée de son entreprise qui a des composantes pour être plus efficace, il a perpétuellement en vue sa vision de futur et cherche à changer le présent en fonction de ce qu’il perçoit… Le coach intervient ainsi pour accompagner l’entrepreneur à franchir le cap entre l’état actuel et celui désiré, à revoir ses aspirations et les concilier avec les réalités économiques et sociales de son entreprise, et surtout à préserver et enrichir sa qualité de vie.
• La croissance : A ce stade, le coach accompagne l’entrepreneur à construire son équipe, à lui faire confiance, à apprendre à déléguer afin de pouvoir se consacrer à perfectionner les procédés et à développer l’entreprise. C’est une phase également capitale, puisque l’Artisan risque d’étouffer le Manager et l’Entrepreneur : A force de vouloir tout faire, il risque d’étouffer son équipe. L’explosion peut ainsi émaner de son équipe, mais aussi du chef d’entreprise lui-même, quand il va prendre conscience qu’il ne pourra plus être partout, et à tout moment. L’intervention du coach sera à ce niveau décisive pour l’accompagner à travailler avec son équipe « s ur son entreprise » et non « dans son entreprise ».
• L’Entrepreneur : Généralement, une entreprise qui survit au-delà de 5 ans est une entreprise qui aurait atteint la phase de maturité. La perspective d’un chef d’entreprise mature diffère beaucoup de celle de l’Artisan : Il a une volonté de croissance, il est prêt à prendre des risques, le fonctionnement de toute son entreprise le préoccupe, il voit l’entreprise comme un système de production rentable au Coacher un entrepreneur consiste ainsi à être attentif à la phase dont se situe l’entreprise et par conséquent à l’accompagner à développer sa vigilance face aux signes annonciateurs de problèmes de transition mal gérés, signes fréquemment rencontrés chez les entrepreneurs. Plus que n’importe quel autre coaché, un entrepreneur est sans doute une personne très indépendante, qui pourrait mal avouer qu’elle rencontre des soucis, et accepterait ainsi difficilement de se faire accompagner par un coach. La demande d’un coaching pourrait revêtir en un premier lieu la forme d’un échange d’idées, pour s’exprimer et se sentir compris. D’où l’importance de l’écoute, mais aussi  de raisonner     en     termes d’optimisation de temps et de ressources de façon générale. Mettre la rentabilité au centre de l’intérêt, car c’est elle qui va permettre à l’entrepreneur l’accumulation des réserves nécessaires pour affronter les situations imprévues. Pour un coach, prendre en considération ces aspects dans le coaching d’un entrepreneur, c’est l’accompagner vers la réussite, la pérennité et la prospérité.

M. Chafik MEKRAI HARTI

DG du cabinet Horizon RH

Coach ICF

Formateur et consultant senior